À quelques semaines de la fête de la réunification (3 octobre), une prise de position de Bodo Ramelow, vice‑président du Bundestag et figure du parti Die Linke, a ravivé les discussions en Allemagne sur les symboles nationaux. Dans un entretien publié le 29 août par la Rheinische Post, l’élu a estimé que le drapeau noir‑rouge‑or et l’hymne national ne faisaient pas l’unanimité dans l’ex‑Allemagne de l’Est et a suggéré d’envisager une consultation populaire dans le cadre d’une éventuelle refonte constitutionnelle.
Le propos et son retrait partiel
Ramelow a rapidement précisé, quelques jours après, qu’il ne proposait pas la suppression immédiate des emblèmes. Il a souligné la portée historique des couleurs nationales, les qualifiant « couleurs de la liberté », et présenté son intervention comme une invitation à la discussion démocratique, éventuellement via l’article 146 de la Constitution, qui prévoit une procédure pour adopter une nouvelle constitution par voie référendaire.
Il a également évoqué la Kinderhymne, poème de Bertolt Brecht parfois proposé comme hymne alternatif moins « nationaliste », sans pour autant en faire une proposition formelle de remplacement.
Réactions politiques
Les réactions ont été vives et transversales. À droite, des élus de la CDU ont critiqué la démarche. Carsten Linnemann a mis en garde contre un risque pour l’ordre démocratique, estimant que les symboles de l’État incarnent les droits fondamentaux. Andrea Lindholz a reproché à Ramelow un manque de neutralité et Andreas Bühl, chef de la fraction CDU en Thuringe, a qualifié l’initiative de « dangereuse ».
Des représentants de l’extrême droite ont aussi repris le débat à leur compte. Tobias Teich (AfD en Bavière) a regretté que seule la troisième strophe de l’hymne soit aujourd’hui chantée et a appelé à une réaffirmation plus « courageuse » des symboles nationaux, même si son groupe a dans la foulée pris ses distances.
Souvenirs historiques et clivages Est/Ouest
Le débat révèle des tensions historiques persistantes entre l’Est et l’Ouest du pays. Si le drapeau noir‑rouge‑or est associé depuis le XIXe siècle à des mouvements démocratiques et a été brandi par les manifestants est‑allemands avant la chute du mur, l’hymne porte une histoire plus lourde. Composé à partir d’un texte d’August Heinrich Hoffmann von Fallersleben, l’hymne national a vu son utilisation détournée sous le IIIe Reich, qui privilégia la première strophe. Depuis 1949, la République fédérale a retenu uniquement la troisième strophe, centrée sur « l’unité, le droit et la liberté ».
Pour Ramelow, ce passé pèse encore pour une partie de la population, notamment dans l’ex‑RDA, où certains éprouvent des réserves face aux emblèmes actuels. Trente‑cinq ans après la réunification, ces lignes de fracture culturelles et mémorielles restent sensibles.
Un débat de fond, une question de méthode
Au‑delà des positions partisanes, la polémique pose une question de méthode : comment traiter, démocratiquement et sereinement, des symboles nationaux chargés d’histoire ? Ramelow propose une consultation comme instrument possible, mais son intervention montre combien ces sujets, mêlant mémoire et identité, peuvent rapidement polariser le débat politique en Allemagne.
- Contexte : déclaration dans la Rheinische Post le 29 août.
- Acteurs : Bodo Ramelow (Die Linke), réactions de la CDU et de l’AfD.
- Enjeu : mémoire, identité nationale et clivages Est/Ouest.
La discussion devrait se maintenir dans les semaines à venir, alors que l’Allemagne se prépare à célébrer la réunification, moment traditionnel d’affirmation des symboles nationaux.