Des heurts ont opposé lundi policiers et élus du principal parti d’opposition turc (CHP) au siège régional d’Istanbul, après l’entrée par la force d’un administrateur désigné par l’État, ont constaté des journalistes.
Les faits
Dans la matinée puis en début d’après-midi, des centaines d’élus et de partisans du CHP ont tenté d’empêcher la prise de contrôle du bâtiment où siège la direction provinciale du parti à Sariyer, district d’Istanbul. Les forces de l’ordre ont utilisé du gaz lacrymogène et procédé à « au moins une dizaine » d’interpellations, selon deux journalistes présents sur place. En début d’après-midi, l’administrateur nommé par les autorités a finalement pu pénétrer dans les locaux, soutenu par une colonne de policiers équipés de boucliers.
- Action de police : intervention musclée pour permettre l’entrée de l’administrateur d’État.
- Opposition locale : élus et sympathisants du CHP ont fait barrage toute la nuit et jusqu’à la mi-journée.
- Arrestations : au moins une dizaine de personnes interpellées selon des journalistes.
Contexte judiciaire et politique
La destitution de la direction provinciale du CHP a été ordonnée la semaine précédente par la justice, qui évoque des soupçons d’irrégularités lors d’un congrès du parti en 2023. Le CHP dénonce une manœuvre politique et accuse le pouvoir d’avoir engagé un « coup judiciaire » pour affaiblir l’opposition.
Les autorités ont nommé à la tête de la branche provinciale Gürsel Tekin, ancien vice-président du CHP entre 2010 et 2014. Exclu du parti la semaine passée après avoir accepté la mission des autorités, M. Tekin a déclaré vouloir « simplement sauver (le) parti », selon des propos rapportés par les médias.
Mesures restrictives et réactions
Le gouvernorat d’Istanbul a interdit jusqu’à mercredi soir les manifestations dans plusieurs districts, dont Sariyer. Par ailleurs, des restrictions d’accès à certains réseaux sociaux et services de messagerie — notamment X, Instagram et WhatsApp — ont été relevées à Istanbul depuis dimanche soir, selon l’ONG Netblocks qui surveille l’accès à Internet.
Pour les analystes, ces décisions s’inscrivent dans un contexte de tensions politiques croissantes : l’arrestation récente de l’ancien maire d’Istanbul Ekrem İmamoğlu, figure majeure du CHP et rival du président Recep Tayyip Erdogan, a déjà renforcé les inquiétudes de l’opposition. Certains redoutent désormais qu’une décision similaire de révocation ne vise prochainement la direction nationale du CHP.
Pourquoi ça compte
La prise de contrôle du siège régional et la nomination d’un administrateur loyal aux autorités marquent une nouvelle étape dans la confrontation entre l’État et le principal parti d’opposition. Elles soulèvent des interrogations sur l’indépendance des institutions judiciaires et administratives en Turquie, ainsi que sur la capacité de la société civile à se mobiliser face à des mesures restrictives.
Les informations rapportées dans cet article sont issues de constats de journalistes présents sur place et d’agences de presse.