Nommé par Emmanuel Macron en moins de 24 heures, Sébastien Lecornu prend place à Matignon après la chute du gouvernement de François Bayrou. Ancien ministre des Armées et ancien maire de Vernon, il hérite d’une situation politique tendue et d’une feuille de route serrée : former une équipe, prononcer sa déclaration de politique générale, bâtir le budget 2026 dans des délais constitutionnels, éviter une nouvelle censure et relancer des dossiers brûlants laissés en suspens.
Les cinq priorités immédiates
- Former un gouvernement
- Prononcer la déclaration de politique générale
- Construire en urgence le projet de loi de finances 2026
- Obtenir un accord de non-censure au Parlement
- Reprendre les grands dossiers parlementaires et réglementaires
Former un gouvernement, un casse-tête politique
Lecornu doit composer très vite son équipe. Les options évoquées sont variées : s’appuyer sur des profils venus du centre et de la sociale-démocratie, tenter de séduire des personnalités issues de la gauche non encartée, ou mobiliser les forces de droite ralliées à la macronie. La participation des Républicains n’est pas automatique, et plusieurs responsables ont déjà conditionné leur engagement. La rapidité de la composition sera déterminante pour apaiser les tensions et préparer la suite de l’action gouvernementale.
La déclaration de politique générale, moment décisif
Avant toute chose, le nouveau premier ministre devra prononcer sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale. Cet exercice, très scruté, servira à poser les lignes directrices de son action et, traditionnellement, à demander un vote de confiance. Après la sortie brutale de François Bayrou, renversé après avoir soumis sa gestion au Parlement, Lecornu tentera d’obtenir la bienveillance des blocs parlementaires sans prendre de risques excessifs.
Un budget 2026 à construire contre la montre
Le défi le plus technique et le plus périlleux est le budget. Les textes doivent être déposés d’ici la mi-octobre pour respecter les délais constitutionnels. Bercy travaille sur le projet de loi de finances 2026 depuis des mois, mais il est probable que Lecornu et ses équipes devront revoir la copie pour tenir compte des exigences des partenaires et des lignes rouges des oppositions. Le Parti socialiste maintient, entre autres revendications, la taxe dite Zucman sur les hauts patrimoines. Le Rassemblement national, pour sa part, réclame des baisses du «coût de l’immigration» et une réduction de la contribution française à l’Union européenne.
Si un accord ne peut être trouvé, le gouvernement pourrait être tenté par des procédures d’urgence, dont le recours à l’article 49.3, mais cette option expose aussi au risque d’une motion de censure.
Éviter les motions de censure
Matignon est un champ de mines parlementaire. Pour durer, Lecornu devra obtenir un accord de non-censure ou la bienveillance d’au moins l’un des blocs capables de faire pencher la majorité : les 66 députés socialistes évoqués ou les 123 députés du bloc mariniste. Sans une forme de compromis, le nouveau gouvernement risque de connaître le même sort que ses prédécesseurs.
Reprendre les dossiers brûlants
Outre le budget, plusieurs textes et décisions attendent une relance. Parmi eux figurent la proposition de loi Gremillet sur la programmation énergétique et la publication attendue du décret sur la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Ces sujets sont hautement conflictuels : le RN a déjà menacé de censurer tout plan jugé trop favorable aux énergies renouvelables. Lecornu devra arbitrer ces débats à la fois techniques et politiques.
La semaine à venir sera déterminante. En quelques jours, le nouveau premier ministre devra démontrer qu’il peut gouverner, négocier avec des forces politiques divergentes et respecter des calendriers serrés. Pour Emmanuel Macron, comme pour la majorité, l’enjeu est de stabiliser l’exécutif et d’éviter une spirale d’instabilité institutionnelle.