Macron égale le record historique de sept premiers ministres
Emmanuel Macron a porté, avec la nomination de Sébastien Lecornu, le nombre de premiers ministres nommés sous sa présidence à sept, égalant ainsi un record de la Ve République jusqu’ici détenu par François Mitterrand. Sébastien Lecornu, ancien ministre des Armées et fidèle de la majorité présidentielle depuis 2017, succède à François Bayrou, qui a remis sa démission après avoir été renversé la veille par l’Assemblée nationale lors d’un vote de confiance.
Le choix de M. Macron intervient après une période politique mouvementée. En juin 2024, le président a procédé à une dissolution de l’Assemblée nationale dans l’espoir de retrouver une majorité plus stable — décision qui, selon de nombreux observateurs, a finalement fragmenté l’hémicycle et conduit à une situation de tripartition des forces politiques.
Un chapelet de gouvernements depuis 2017
Depuis le début de son premier mandat en 2017, Emmanuel Macron a successivement nommé :
- Édouard Philippe (15 mai 2017 – 3 juillet 2020)
- Jean Castex (3 juillet 2020 – 16 mai 2022)
- Élisabeth Borne (16 mai 2022 – 9 janvier 2024)
- Gabriel Attal (9 janvier 2024 – 5 septembre 2024)
- Michel Barnier (5 septembre 2024 – 13 décembre 2024)
- François Bayrou (13 décembre 2024 – 9 septembre 2025)
- Sébastien Lecornu (nommé septembre 2025)
La succession rapide de chefs de gouvernement place la présidence face à des interrogations sur la stabilité et l’efficacité du rôle de Matignon dans le système politique actuel.
Comparer Mitterrand et Macron : contexte institutionnel différent
François Mitterrand avait lui aussi travaillé avec sept premiers ministres répartis sur deux mandats — alors que son premier mandat était de sept ans. Mais la comparaison entre les deux présidences garde ses limites : la réforme constitutionnelle de 2000, qui a instauré le quinquennat présidentiel, et la modification du calendrier électoral en 2001 ont profondément changé les équilibres politiques et réduit les risques de cohabitation automatique liés au calendrier ancien.
Le politologue Christophe Boutin, professeur de droit public, souligne que Macron a « changé plus rapidement de chef de gouvernement » que Mitterrand et que son second quinquennat n’est pas achevé, laissant la possibilité d’un nouveau record. Il rappelle aussi que le contexte électoral et l’absence de majorité claire à l’Assemblée depuis la dissolution de 2024 expliquent en grande partie la rotation des gouvernements.
Le rôle du premier ministre questionné
Plusieurs voix observent que, sous la présidence Macron, le poste de premier ministre est devenu moins celui d’un « fusible » traditionnel. Christophe Boutin note que les attaques politiques se dirigent désormais davantage vers le chef de l’État lui-même et que les changements à Matignon modifient peu la ligne politique globale. L’exécutif apparaît aujourd’hui tiraillé entre la recherche de stabilité et la nécessité de répondre à une Assemblée fragmentée.
À titre de comparaison, Nicolas Sarkozy reste le seul président de la Ve République à avoir conservé le même premier ministre — François Fillon — pendant l’intégralité de son mandat.
Les défis immédiats de Sébastien Lecornu
À peine nommé, Sébastien Lecornu hérite d’un agenda serré : former un nouveau gouvernement, bâtir un budget et éviter la censure dans un hémicycle sans majorité nette. Le contexte parlementaire tendu rend ces impératifs plus difficiles et expose le nouveau chef du gouvernement à de fortes pressions dès ses premières semaines à Matignon.
La nomination de M. Lecornu marque une nouvelle étape dans une séquence politique intense pour la France, où l’efficacité gouvernementale et la cohérence de l’action publique seront scrutées de près par les partenaires parlementaires et l’opinion publique.