Euthanasie : douze militants d’Ultime Liberté jugés à Paris

Paris. Douze adhérents de l’association Ultime Liberté, âgés de 74 à 89 ans, comparaissent devant le tribunal correctionnel de Paris pour avoir, entre août 2018 et novembre 2020, aidé des dizaines de personnes à se procurer du pentobarbital sur internet, un barbiturique utilisé comme euthanasiant en médecine vétérinaire et employé pour des suicides assistés dans certains pays.

Les faits reprochés

Les prévenus, majoritairement des enseignants retraités au casier judiciaire vierge, sont poursuivis pour des délits relevant de la législation sur le trafic de substances illicites. Selon l’information judiciaire, ils auraient renseigné des personnes souhaitant mettre fin à leurs jours sur la manière d’acheter du pentobarbital via des filières en ligne et, dans certains cas, assisté ces personnes dans le processus.

Le produit, expédié à l’époque depuis le Mexique sous une étiquette neutre « Natural Cosmetics », se présentait en flacons bruns au bouchon bleu. Les autorités américaines ont signalé la filière à l’été 2019, ce qui a déclenché une enquête internationale et une centaine de perquisitions menées en France en octobre 2019.

Un profil des acquéreurs

La liste d’acheteurs retrouvée par les enquêteurs révèle que la majorité des acquéreurs étaient des personnes âgées ou gravement malades, issues souvent de professions intellectuelles. Une trentaine d’entre eux étaient déjà décédés au moment des investigations. Les magistrats notent toutefois que certains cas apparaissaient dissociés d’une pathologie lourde ou du grand âge.

Une action militante et controversée

Ultime Liberté, née d’une scission d’avec l’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD), se présente comme un mouvement militant réclamant la liberté individuelle de disposer de son corps, y compris le droit à un suicide assisté « serein » pour des personnes qui ne sont pas nécessairement en fin de vie mais qui prennent une décision réfléchie.

Claude Hury, présidente d’Ultime Liberté et prévenue centrale, a déclaré que l’objectif de l’association n’était pas de pousser au suicide mais d’offrir la possibilité de décider du moment de sa mort, hors du « diktat médical ».

Procès et enjeux

Le procès, qui doit se prolonger jusqu’au 9 octobre, constituera selon la défense « une occasion de sensibiliser l’opinion publique aux problématiques de la fin de vie », a indiqué Me Arnaud Lévy-Soussan, avocat d’une partie des prévenus. Plusieurs personnalités et spécialistes de la bioéthique, dont le philosophe André Comte-Sponville, l’ancien député Jean-Louis Touraine et la médecin Véronique Fournier, sont attendus à la barre pour éclairer les enjeux éthiques et juridiques liés à la fin de vie.

Les juges devront trancher entre la liberté revendiquée par les militants et le cadre légal français qui encadre strictement la vente et la détention de substances potentiellement létales.

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