Le Caire a annoncé ce week‑end un renforcement significatif de sa présence militaire dans la péninsule du Sinaï, aux abords d’Israël. Selon les médias internationaux, dont Axios et Libération, l’Égypte explique ces mouvements par la nécessité de lutter contre « des actes terroristes » et des « opérations de contrebande ». Le déploiement suscite cependant l’inquiétude de Tel‑Aviv, déjà engagé militairement sur plusieurs fronts.
Déploiement et motivations
Les autorités égyptiennes ont reconnu avoir envoyé des unités supplémentaires dans différentes parties du Sinaï. Officiellement, il s’agit d’opérations de sécurité intérieure visant à endiguer l’insurrection jihadiste qui sévit depuis plus d’une décennie dans la région et à mieux contrôler le trafic illicite le long de la frontière.
Israël, de son côté, suit ces évolutions de près : d’après Axios, le Premier ministre Benyamin Netanyahou a demandé à Donald Trump d’exercer des pressions diplomatiques sur Le Caire afin de freiner ce renforcement. L’intervention américaine, évoquée par la presse, souligne la sensibilité stratégique de tout changement d’équilibre militaire dans le Sinaï.
Une péninsule démilitarisée et des règles issues de 1979
La péninsule du Sinaï est régie depuis 1979 par les accords de paix entre l’Égypte et Israël, qui ont établi une démilitarisation progressive divisée en zones (A, B, C et D). Ces dispositions prévoient que tout changement notable de dispositif militaire fasse l’objet d’une consultation avec l’État hébreu. Un renforcement marqué, comme celui observé ces derniers jours, est donc scruté avec attention par Tel‑Aviv.
- Zone A : présence d’une division d’infanterie mécanisée égyptienne autorisée.
- Zones B et C : forces égyptiennes plus légères, opérations de sécurité locale.
- Zone D : présence de la force multinationale (MFO) et limitations strictes.
Rafah, réfugiés et menaces sécuritaires
Le renforcement intervient dans un contexte tendu, marqué par la guerre à Gaza et la fermeture effective de plusieurs points de passage. Rafah, passage crucial pour la bande de Gaza et pour tout flux vers l’Égypte, est devenu un élément central des inquiétudes égyptiennes, qui redoutent un afflux massif de civils et la possible infiltration de combattants parmi les personnes fuyant les combats.
Le risque d’un mélange entre civils et éléments armés nourrit aussi la crainte d’une résurgence ou d’une extension d’cellules jihadistes locales, notamment de groupes historiques comme Ansar Bayt al‑Maqdis, rebaptisé « Province du Sinaï » après son allégeance à l’État islamique en 2014.
Position égyptienne et rejet d’un transfert de population
Le Caire a fermement rejeté l’idée d’accueillir une expulsion ou un transfert massif des Gazaouis. Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a déclaré que le déplacement forcé serait inacceptable et qu’il constituerait la fin de la cause palestinienne. L’Égypte et la Jordanie, premier pays arabe ayant signé la paix avec Israël, se sont publiquement opposées à toute démarche visant à dépeupler Gaza.
Dans le débat régional, certaines voix israéliennes, notamment de responsables d’extrême droite, ont évoqué le principe d’un transfert pour réduire la population de la bande de Gaza — propositions dénoncées par Le Caire et par plusieurs acteurs régionaux comme irréalistes et dangereuses.
Enjeux diplomatiques
Ce renforcement égyptien illustre la complexité des équilibres au Proche‑Orient : sécurité intérieure, obligations internationales issues des accords de paix, crainte d’une crise humanitaire régionale et tensions entre alliés. La situation dans le Sinaï demeure donc un sujet de surveillance diplomatique intense, entre consultations bilatérales et craintes d’escalade.
Contexte : ces développements interviennent après des mois de violences autour de Gaza et alors que les autorités égyptiennes tentent de conjuger la sécurité nationale avec des obligations régionales et humanitaires.