Le procès de l’ex-anesthésiste Frédéric Péchier se poursuit devant la cour d’assises du Doubs. En troisième semaine d’audience, la cour a entendu, jeudi, le témoignage de collègues de la clinique Saint-Vincent de Besançon, profondément marqués par des décès inexpliqués imputés à l’accusé.
Les premiers dossiers examinés : octobre 2008
La justice a examiné les deux premiers décès qui sont reprochés à M. Péchier, survenus en octobre 2008. L’accusation l’impute à une série de détournements : selon l’enquête, l’ancien anesthésiste aurait frelaté des poches de produits anesthésiants pour nuire à des collègues en conflit avec lui et, selon l’acte d’accusation, pour mettre en valeur ses qualités de réanimateur.
Des collègues bouleversés
Le premier décès concernait Damien Iehlen, 53 ans, victime d’un arrêt cardiaque en marge d’une intervention. Sa collègue anesthésiste, Catherine Nambot (née en 1955), aujourd’hui décédée, avait été profondément affectée par l’événement, ont rapporté des témoins. Delphine Ravily, alors cheffe du service pharmacie de la clinique, a décrit devant la cour l’état de sidération de la médecin : « Le docteur Nambot était bouleversée, je l’ai vue dans un état d’incompréhension ».
Lors des auditions, Mme Nambot avait raconté avoir « vécu un enfer pendant neuf ans » après ce décès. Elle assurait avoir respecté les règles anesthésiques et se disait incapable de comprendre comment des doses mortelles d’anesthésiant ont pu se retrouver dans l’organisme de son patient.
Quatre jours plus tard, la patiente Suzanne Ziegler, 74 ans, est décédée lors d’un autre incident. Ce dossier a aussi pesé lourdement sur le moral des équipes. L’anesthésiste en charge de Mme Ziegler, Colette Arbez (née en 1948), ne peut pas témoigner en raison d’un état de santé jugé incompatible avec une audience, selon la présidente du tribunal.
Une parole rapportée
Un ancien infirmier de la clinique, Davy Gérôme, a raconté avoir entendu M. Péchier tenir des propos sur l’une de ses collègues : « Elle devrait partir en retraite plus tôt, on va l’aider ». M. Gérôme a expliqué que, d’abord prise pour une plaisanterie, la remarque l’a ensuite profondément choqué.
La défense a relativisé ces propos. Me Randall Schwerdorffer, avocat de l’accusé, a déclaré que « dans tous les milieux professionnels, on fait tous des blagues un peu raides », minimisant ainsi l’échange rapporté.
La suite du procès
Frédéric Péchier, qui nie les faits, est jugé pour 30 empoisonnements, dont 12 mortels, entre 2008 et 2017. Comparant libre, il encourt la réclusion criminelle à perpétuité si sa culpabilité est retenue. Le verdict est attendu le 19 décembre.
Les audiences se poursuivent, tandis que la cour passe en revue les différentes victimes et les circonstances médicales et techniques entourant ces décès.