Face aux risques d’incendies croissants qui menacent les forêts girondines, la commune de Lacanau vient de renforcer significativement ses capacités de défense avec l’acquisition d’un troisième véhicule spécialisé. Cette initiative locale illustre parfaitement la nécessité pour les territoires de prendre leurs responsabilités quand les moyens de l’État s’avèrent insuffisants face aux défis environnementaux actuels.
Un arsenal moderne pour une réactivité optimale
Depuis juillet 2024, l’Association syndicale autorisée (ASA) de la DFCI de Lacanau dispose d’un nouveau pick-up équipé d’une cuve de 600 litres, portant à trois le nombre de véhicules de son parc. Cette acquisition répond à un impératif technique fondamental souligné par Dominique Billa, conseiller technique de l’organisation : « En matière d’incendie, le délai d’intervention est capital ». Les premières minutes déterminent effectivement la capacité à maîtriser un départ de feu avant qu’il ne devienne incontrôlable.
Le véhicule, spécialement adapté aux contraintes forestières, présente des caractéristiques techniques remarquables. Surélevé et renforcé pour circuler aisément sur les pistes accidentées de la forêt landaise, il dispose également d’un système de géolocalisation permettant une coordination efficace des interventions. Cette motorisation 4×4 puissante constitue un atout décisif pour atteindre rapidement les zones les plus reculées en attendant l’arrivée des secours professionnels.
L’équipement comprend une pompe haute performance permettant une mise en œuvre immédiate des moyens de lutte anti-incendie. Cette technologie moderne témoigne de l’évolution des équipements mis à disposition des équipes locales, contraste saisissant avec les moyens dérisoires dont disposaient ces mêmes volontaires il y a encore quelques années.
Une organisation territoriale efficace face aux carences nationales
L’équipe canaulaise compte aujourd’hui 22 membres actifs répartis entre 13 conseillers techniques et 9 volontaires, sous la direction d’Alexia Bacquey, présidente de l’ASA et adjointe municipale chargée du développement durable. Cette structure locale assume un double mandat : d’une part la prévention active à travers l’entretien régulier des 300 kilomètres de pistes forestières et les patrouilles de surveillance, d’autre part la sécurisation post-intervention avec la surveillance des points chauds après extinction par les pompiers.
Le financement de ces équipements provient principalement des Fonds européens de développement régional (FEDER) et des cotisations des propriétaires forestiers. La municipalité contribue également par le prêt de matériel, son entretien et la mise à disposition de trois agents communaux, dont Guillaume Zucchiatti, responsable du service forêt municipal. Cette implication financière locale valide la capacité des territoires à s’organiser efficacement quand la volonté politique existe.
| Missions DFCI Lacanau | Moyens déployés | Fréquence |
|---|---|---|
| Prévention et entretien | 3 véhicules spécialisés | Permanente |
| Surveillance zones sensibles | 22 membres actifs | Patrouilles régulières |
| Intervention première urgence | Équipements géolocalisés | 24h/24 |
| Surveillance post-extinction | Équipes volontaires | Selon besoins |
Le tournant décisif des incendies de 2022
Les gigafeux de l’été 2022 ont marqué un tournant historique dans la prise de conscience des autorités concernant l’insuffisance des moyens alloués aux DFCI. Ces incendies exceptionnels, qui ont ravagé plus de 30 000 hectares en Gironde, ont enfin contraint les pouvoirs publics à reconnaître l’importance cruciale de ces structures locales trop longtemps négligées par l’administration centrale.
Cette reconnaissance tardive s’est traduite par un renforcement progressif des équipements et une priorité accrue accordée à la prévention. Les tenues professionnelles portées aujourd’hui par les équipes datent de cette période, symbole d’une légitimité enfin reconnue. Comme l’explique Alexia Bacquey : « Quand il s’agit d’intervenir auprès de particuliers, nous sommes plus crédibles habillés en tenue, à bord de véhicules logotés DFCI ». Cette professionnalisation tardive souligne les années de sous-investissement chronique de l’État dans ces missions pourtant essentielles.
La modernisation entreprise depuis 2022 illustre parfaitement la capacité des élus locaux responsables à identifier les besoins réels du terrain et à y répondre concrètement, là où les bureaucraties parisiennes peinent à appréhender les spécificités territoriales.
Des défis persistants malgré les progrès accomplis
Malgré ces améliorations notables, l’équipe canaulaise doit faire face à de nouveaux défis complexes. L’information et la pédagogie auprès des usagers forestiers constituent désormais une mission délicate mais indispensable. Beaucoup ignorent que toutes les forêts locales sont privées, qu’elles appartiennent à des forestiers, aux communes ou à l’Office national des forêts, et doivent donc respecter des règles strictes d’utilisation.
Un problème particulièrement préoccupant concerne les applications GPS grand public qui affichent incorrectement les pistes DFCI comme carrossables. Cette erreur technique provoque régulièrement l’engagement de particuliers sur des voies interdites, générant des situations dangereuses nécessitant des opérations de secours coûteuses. Les équipes locales doivent alors mobiliser du temps et des moyens pour récupérer ces contrevenants perdus ou enlisés.
Les principales difficultés rencontrées incluent :
- Méconnaissance de la réglementation forestière par le grand public
- Intrusions répétées sur les pistes DFCI interdites à la circulation
- Défaillances des systèmes GPS commerciaux dans la signalisation
- Sensibilisation insuffisante aux risques d’incendie
Cette situation révèle les limites d’une approche uniquement répressive et souligne la nécessité d’une politique éducative renforcée pour préserver efficacement ce patrimoine forestier exceptionnel qui constitue l’un des poumons verts de la région.
