Des centaines de travailleurs sud‑coréens ont été arrêtés lors d’un raid mené par les services américains de l’immigration (ICE) sur le chantier d’une usine de batteries dans la petite ville d’Ellabell, en Géorgie. L’opération, qualifiée par les autorités comme l’une des plus importantes de l’histoire du service sur un même site, a plongé les relations diplomatiques entre Washington et Séoul dans une vive tension.
Raid à Ellabell (Géorgie)
Jeudi dernier, des dizaines de véhicules des forces de l’ordre, dont de grands SUV aux vitres teintées, ont investi le chantier des groupes sud‑coréens impliqués dans la construction d’une usine de batteries. L’objectif officiel de l’opération était d’arrêter 475 ouvriers soupçonnés de travailler illégalement sur le site; une grande partie d’entre eux sont de nationalité sud‑coréenne. Des images diffusées par l’ICE montrent des ouvriers sommés de poser les mains contre un mur, menottés, parfois enchaînés.
Visas et raisons invoquées
Plusieurs experts interrogés soulignent que, depuis l’arrivée au pouvoir de l’administration Trump, l’accès à certains visas de travail a été rendu plus strict. L’avocat Yum Seung‑yul a rappelé que les visas de type H‑1B, souvent utilisés pour des postes qualifiés, sont devenus plus difficiles à obtenir pour des emplois du bâtiment. Selon un responsable de la Sécurité intérieure cité par la presse américaine, des travailleurs auraient franchi la frontière illégalement tandis que d’autres auraient dépassé la durée de leur visa.
Réactions à Séoul et négociations
La diffusion des images a suscité une très forte émotion en Corée du Sud. Plusieurs titres sud‑coréens ont dénoncé le traitement réservé aux ouvriers et parlé de «rupture de confiance» entre alliés. Le porte‑parole de la présidence sud‑coréenne a demandé que les droits des travailleurs ne soient pas «injustement violés» lors de l’application des lois américaines.
Face à la polémique, le ministre des Affaires étrangères sud‑coréen, Cho Hyun, s’est rendu à Washington pour négocier directement. Selon le Financial Times, il a prévu des discussions avec le secrétaire d’État Marco Rubio. Le bureau présidentiel sud‑coréen a indiqué qu’environ 300 ressortissants devraient être rapatriés à bord d’un vol charter.
Réponse de Washington et enjeu industriel
Donald Trump est intervenu via son réseau social pour tempérer la crise, assurant que les investissements étrangers sont les bienvenus, à condition que l’embauche des employés se fasse «légalement», et appelant les entreprises à former des travailleurs américains. Les groupes sud‑coréens concernés — dont LG et Hyundai — construisent dans l’État de Géorgie un projet d’environ 4,3 milliards de dollars, présenté comme créateur de milliers d’emplois une fois achevé en 2026.
Contexte national
Cette opération intervient dans un contexte de durcissement général de la politique migratoire américaine depuis l’élection de novembre 2024. Des analyses récentes, notamment du Pew Research Center, notent une baisse de la population immigrée aux États‑Unis, un phénomène inédit depuis plusieurs décennies et lié aux mesures exécutives prises par l’administration.
La tension entre impératifs sécuritaires annoncés par Washington et préoccupations diplomatiques et économiques de Séoul illustre la difficulté pour les deux alliés de concilier contrôle de l’immigration et attractivité industrielle. Les prochains jours, marqués par les discussions entre responsables sud‑coréens et américains, seront déterminants pour apaiser — ou accentuer — la crise.