Les habitudes de consommation évoluent dans les bars bordelais : si les terrasses restent animées, l’appétence pour les spiritueux recule au profit des cocktails et de la bière. Des gérants et des clients interrogés par Sud Ouest confirment une tendance déjà observée dans les études nationales.
Chiffres nationaux et contrastes locaux
Selon l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), la consommation hebdomadaire d’alcool en France a diminué de 23 % entre 2000 et 2022. Sur la même période, la consommation de bière est en hausse de 17,4 %, tandis que les spiritueux et le vin reculent respectivement de 14,8 % et 32,9 %.
Témoignages depuis les bars bordelais
À Bordeaux, plusieurs établissements constatent toutefois des situations contrastées. Julien Laisney, propriétaire du pub Cock & Bull près du cours Pasteur, indique être « en hausse de consommation et de fréquentation par rapport à l’an passé » et écouler « entre 40 et 50 fûts de bière par semaine, comme avant le Covid ». En face, Esteban Guinaudeau, co-gérant du Carnaval Café, confirme que « les cocktails fonctionnent bien, pas trop l’alcool fort » et qu’ils tournent autour de « 35 fûts par semaine ».
Des sorties souvent amorcées à domicile
Plusieurs barmen observent aussi un changement de comportement : de nombreux jeunes font déjà des soirées chez eux et arrivent en ayant déjà consommé « une ou deux bières », comme le relève Olivier Lemoine du Saint-Aubin, place de la Victoire. Cette pratique modifie la demande sur place et explique en partie la montée des cocktails et des softs en terrasse.
Évolution des rituels et impact du pouvoir d’achat
La baisse de la consommation au verre pour les repas — « le petit verre avant ou le digestif après » — est également notée par le personnel de bar. Benoît Boyé, responsable du soir au Saint-Aubin, met en avant l’impact du pouvoir d’achat et des priorités familiales : « C’est fini le complet apéro, repas, digestif. »
Offre commerciale et demandes nouvelles
Pour répondre aux nouvelles attentes, certains établissements diversifient leur carte : choix de bières sans alcool, cocktails sans alcool (le Saint-Aubin propose par exemple cinq recettes), tandis que les ventes de softs restent, selon les barmen, une part limitée du chiffre d’affaires — autour de 5 à 10 % chez certains.
Jeunes consommateurs : moins d’injonctions, plus d’options
Parmi les clients, des comportements générationnels apparaissent : certains adoptent des périodes sans alcool comme défi personnel (Dry January), d’autres rejettent l’injonction sociale à boire. Martin, 27 ans, et son frère constatent l’abandon de certaines habitudes familiales, comme le verre de vin quotidien de leurs grands-parents.
En résumé, à Bordeaux comme ailleurs, la baisse générale de la consommation d’alcool coexiste avec une fréquentation soutenue des bars et une transformation des offres : la bière et les cocktails tirent leur épingle du jeu, tandis que les alcools forts accusent le recul.