Jugés à Bordeaux, une institutrice et son ex-mari sont poursuivis pour escroquerie après avoir simulé pendant plusieurs années une leucémie afin de collecter des dons en ligne. Selon l’accusation, le couple a réuni, entre 2019 et 2024, plus de 82 700 euros via trois cagnottes Leetchi prétendument destinées à financer des traitements et l’achat de cellules souches.
L’affaire dans les grandes lignes
La procédure vise une femme de 36 ans, mère de deux enfants, et son ex-époux de 37 ans. Lors de l’audience, le parquet a requis douze mois de prison avec sursis à l’encontre des deux prévenus. Outre l’escroquerie, l’institutrice est également poursuivie pour faux et usage de faux, après la production de deux attestations médicales falsifiées.
Les enquêteurs estiment que plus d’un millier de personnes, y compris certaines « personnalités », ont contribué aux cagnottes. Une partie des sommes a ensuite été utilisée, selon l’accusation, pour des achats personnels : un smartphone, un cabanon de jardin, des voyages et un van, et non exclusivement pour des soins médicaux annoncés.
L’engrenage du mensonge
La prévenue a expliqué en audience avoir commencé à feindre une maladie en 2015, à l’époque où son conjoint était parti en Espagne pour ses études. Elle a déclaré avoir cherché à retenir son mari par peur qu’il ne la quitte. Après une première période de simulation, elle a poursuivi la supercherie au fil des années, évoquant des rechutes lors de la naissance de ses enfants et publiant de fausses photos de séjours hospitaliers « sur fond blanc ».
Elle a aussi déclaré avoir fait croire que son fils souffrait d’un lymphome de Hodgkin, invoquant des difficultés liées à la garde et à l’attention portée par l’assistante maternelle. La prévenue, décrite par la défense comme vulnérable et en proie à des comportements précédemment problématiques (elle avait admis avoir inventé un viol durant son adolescence), a dit s’être « empêtrée dans ses mensonges » et s’en être voulue « énormément » pour ceux qui luttent réellement contre la maladie.
La position de l’ex-mari
L’ex-époux a affirmé devant le tribunal n’avoir jamais assisté à une visite médicale ni consulté de documents médicaux attestant d’un traitement. Il a soutenu qu’il avait constitué les cagnottes « en toute bienveillance » et « en confiance » et a exprimé sa honte et son désarroi. Sa défense a insisté sur son ignorance des éléments médicaux et a demandé de ne pas confondre maladresse ou lâcheté morale et commission d’un délit pénal.
Le procès s’est tenu à Bordeaux ; le jugement a été mis en délibéré et sera rendu le 30 octobre.
Contexte : la fraude aux cagnottes en ligne, bien que minoritaire, soulève des questions sur la confiance des donateurs et sur le contrôle des plateformes. Les montants importants et la multiplication des campagnes rendent la vigilance nécessaire, tant pour les internautes que pour les opérateurs de collecte.