Carla Arbez, ouvreuse formée sur l’île d’Oléron et passée par le Stade Rochelais puis Bayonne, retrouve la titularisation pour la demi‑finale de la Coupe du monde face à l’Angleterre ce samedi. Son parcours avec le XV de France féminin reste marqué par des hauts et des bas, entre promesses, pertes de repères et travail acharné pour rebondir.
Une trajectoire sinueuse au sein des Bleues
Perçue en 2023 comme l’héritière de Caroline Drouin à l’ouverture, la Bordelaise a connu une sélection en dents de scie : titularisée au coup d’envoi du Mondial contre l’Italie, elle a ensuite été écartée des feuilles de match lors des rencontres suivantes contre le Brésil et l’Afrique du Sud en phase de groupes, puis pour le quart de finale contre l’Irlande. Elle revient en revanche dans le quinze de départ pour affronter les favorites anglaises en demi‑finale.
Concurrence interne et choix des sélectionneurs
Le chassé‑croisé entre Arbez et Lina Queyroi a rythmé les dernières saisons : Queyroi avait pris la place en charnière aux côtés de Pauline Bourdon Sansus, avant d’être victime d’une commotion en fin de rencontre contre l’Irlande. La co‑séléctionneuse Gaëlle Mignot a défendu ces basculements comme des « choix stratégiques », insistant sur le fait que l’absence d’une joueuse sur une feuille de match ne traduisait pas un « classement caché » mais une gestion collective du groupe.
Perdre puis retrouver : le poids du haut niveau
Arbez relate l’impact émotionnel de ces aléas : après une année 2023 ascendante (contrat fédéral et titularisation au Six Nations), elle a connu en 2024 la désillusion de ne pas être citée dans le groupe élargi et la perte du contrat fédéral. Plutôt que de céder, elle a choisi de se renforcer mentalement et de travailler sa lucidité de match et la gestion des émotions pour revenir au plus haut niveau.
Préparation technique et vie professionnelle
Pour vivre en parallèle du rugby (discipline encore majoritairement amateur chez les femmes), Arbez exerce comme coach sportive en entreprise. Sur le plan technique, elle a travaillé spécifiquement avec Benoît Trémoulinas, ancien latéral des Girondins de Bordeaux, sur la coordination, la dissociation et le jeu au pied — un aspect devenu déterminant dans le rugby moderne.
Contexte : un Mondial et un engouement inédit
Les Bleues ont atteint leur objectif en accédant à la demi‑finale, et l’écho médiatique et populaire autour de la compétition dépasse les attentes. Ce regain d’attention met aussi en lumière la précarité structurelle du rugby féminin en France, où seules une trentaine d’internationales bénéficient aujourd’hui d’un statut et d’une rémunération fédérale.
À l’aube de la rencontre décisive contre l’Angleterre, Carla Arbez symbolise ce mouvement : joueuse talentueuse aux trajectoires irrégulières, elle illustre la fragilité et la résilience nécessaires pour s’imposer en équipe nationale. Titulaire samedi, elle aura l’occasion de confirmer que ses efforts de remise à niveau ont porté leurs fruits.