Le frelon asiatique s’est installé en France, quelles menaces ?
Le frelon à pattes jaunes (Vespa velutina nigrithorax), originaire d’Asie, est implanté sur l’ensemble du territoire français depuis deux décennies. Signalé pour la première fois en 2004 dans le Lot‑et‑Garonne et issu d’une lignée proche de Shanghai, il colonise désormais la France métropolitaine, la Corse ayant été touchée en août 2024 avec un nouveau nid signalé à Ajaccio en juillet 2025.
Comment le reconnaître et où il niche
Le frelon asiatique se distingue par un abdomen brun bordé d’une bande jaune orangé et des pattes jaunes. Plus petit que le frelon européen, il construit de grands nids sphériques ou en goutte, souvent perchés à plus de dix mètres dans les arbres, avec une ouverture latérale. Une colonie peut compter jusqu’à 3 000 individus et l’insecte est actif surtout en journée.
Risques pour l’humain : venin, piqûres multiples et allergies
Les piqûres infligées par le frelon asiatique provoquent des douleurs locales, gonflement et signes généraux (vomissements, maux de tête, chute de la tension). Contrairement à l’abeille, ce frelon peut piquer plusieurs fois car il ne perd pas son dard. Le dard, long d’environ 6 mm, peut percer certains vêtements de jardinage.
Une seule piqûre suffit parfois à déclencher une réaction allergique grave (œdème de la gorge, collapse circulatoire) pouvant conduire à un choc anaphylactique. Le traitement d’urgence repose sur l’injection d’adrénaline par stylo auto‑injecteur et la prise en charge hospitalière immédiate.
Que disent les chiffres sanitaires (2014‑2023) ?
Pour la période 2014‑2023, les autorités sanitaires ont analysé les données d’appels aux centres antipoison, passages aux urgences, hospitalisations et décès liés aux piqûres d’hyménoptères. Sur ces dix ans, on recense 6 022 appels aux centres antipoison, 179 141 passages aux urgences, 18 213 hospitalisations (dont 13% en réanimation) et 256 certificats de décès.
Les données ne montrent pas de tendance nette à la hausse ou à la baisse des envenimations au fil des années, malgré la progression du frelon asiatique. Les guêpes restent la principale cause des appels (37%), suivies des frelons toutes espèces (25%) et des abeilles (19%). Lorsque l’espèce a été identifiée, le frelon asiatique représentait 55% des envenimations par frelons. Entre 2014 et 2023, 1,5% des piqûres étaient potentiellement mortelles, majoritairement liées à des réactions allergiques.
Impact majeur sur les abeilles et la filière apicole
Si le risque humain existe, la menace la plus préoccupante reste l’appétit du frelon pour les abeilles domestiques. Sans prédateur local, chaque colonie peut consommer jusqu’à 11 kg d’insectes par an. Les frelons harcèlent les ruches, capturent et dépècent les abeilles, et empêchent les butineuses de sortir, ce qui affaiblit les réserves de miel et la survie hivernale des ruches.
Mesures de protection et lutte
- Piégeage sélectif autour des ruchers : nasses successives pour laisser sortir les petits insectes capturés par erreur.
- Éviter les pièges non sélectifs (bouteilles sucrées) qui nuisent à la biodiversité.
- Utilisation de harpes électriques, muselières à l’entrée des ruches ou autres dispositifs limitant l’accès.
- Périodes recommandées de piégeage : février‑mai (capturer les reines fondatrices) et mi‑août‑novembre (piéger les futures fondatrices avant l’hivernation).
Une loi entrée en vigueur le 15 mars 2025 prévoit la mise en place d’un plan national de lutte, l’encadrement du piégeage et l’indemnisation des apiculteurs ; les décrets d’application restent à paraître.
Face à une espèce désormais ancrée en France, la prévention et la protection des ruchers, associées à une vigilance sanitaire, constituent les réponses concrètes pour limiter les dégâts sur la biodiversité et réduire les risques pour les personnes.