États-Unis — Jerry Greenfield, cofondateur de la marque de glaces Ben & Jerry’s, a annoncé le 17 septembre 2025 qu’il quittait l’entreprise qu’il avait créée en 1978, invoquant des désaccords profonds sur les « valeurs » de la marque depuis son rachat par Unilever en 2000.

Un départ motivé par des conflits de valeurs

Dans une lettre publiée sur X par son ancien associé Ben Cohen, M. Greenfield explique qu’il « ne pouvait plus, en toute conscience, et après 47 ans, rester un employé de Ben & Jerry’s ». Il accuse la direction d’avoir réduit la marque « au silence » et de l’avoir « mise à l’écart par crainte de contrarier le pouvoir », pointant des divergences sur les engagements de l’entreprise en matière de droits civiques, de droits des immigrés, des femmes et de la communauté LGBTQ.

Ben & Jerry’s s’était forgé une réputation d’activisme sur des sujets sociaux et environnementaux. Les deux fondateurs avaient, lors de la vente à Unilever, négocié un conseil d’administration indépendant pour préserver l’« intégrité » de la marque. Selon M. Greenfield, cette indépendance se serait érodée au fil des années.

Contexte : tensions récurrentes avec Unilever

Les relations entre Ben & Jerry’s et sa maison-mère Unilever ont été marquées par plusieurs épisodes de tensions. En 2022, la filiale n’avait pas réussi à empêcher Unilever de vendre ses produits dans les colonies israéliennes en Cisjordanie, une décision qui avait provoqué une vive controverse internationale et heurté l’image militante de la marque.

Plus récemment, Unilever a annoncé la scission de sa division glaces, qui devra devenir en novembre une entité indépendante baptisée « The Magnum Ice Cream Company », basée à Amsterdam et principalement cotée aux Pays-Bas — un mouvement qui modifie l’organisation du groupe et, selon certains observateurs, la marge de manœuvre politique de Ben & Jerry’s.

Réactions et étapes suivantes

Un porte-parole d’Unilever a réagi en rappelant que le groupe « ne partage pas le point de vue de M. Greenfield » et qu’il avait cherché à « engager un dialogue constructif avec les deux cofondateurs sur la manière de renforcer la position de Ben & Jerry’s dans le monde, fondée sur ses valeurs ». Ben Cohen et Jerry Greenfield avaient d’ailleurs adressé la semaine précédente une lettre ouverte demandant que la marque retrouve son indépendance.

Le départ de M. Greenfield intervient dans un climat tendu autour des prises de position publiques de la marque : en mai, Ben Cohen a été expulsé d’une audition parlementaire à Washington après avoir critiqué le soutien du gouvernement américain à Israël dans le cadre du conflit à Gaza.

Ce départ marque une étape importante dans l’histoire de Ben & Jerry’s, entreprise devenue symbole d’un certain activisme d’entreprise mais aujourd’hui confrontée aux réalités d’une maison-mère internationale et à la recomposition du marché des glaces au sein des grands groupes.

Sources : AFP, communiqué des fondateurs, déclarations publiques d’Unilever.