Le gouvernement reconnaît rencontrer des « difficultés » pour enrayer la montée de la pauvreté en France, après la publication des chiffres 2023 montrant un niveau inédit depuis des décennies. L’Insee recense près de 9,8 millions de personnes en situation de pauvreté en 2023 en France métropolitaine, un record qui interroge l’efficacité des politiques sociales.
Un bilan alarmant reconnu par l’État
Lors d’une conférence consacrée aux « nouvelles formes de pauvreté » à Paris, la déléguée interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a souligné le « paradoxe » d’un modèle redistributif souvent présenté comme enviable et l’incapacité à faire reculer réellement le nombre de personnes pauvres. « On n’a pas de quoi être fiers collectivement de ce que montrent les statistiques », a-t-elle déclaré, ajoutant : « On fait de l’aménagement : on rend la souffrance ponctuellement moins difficile par le jeu des prestations sociales mais on a du mal à faire qu’il y ait moins de pauvres. »
Qui sont les plus exposés ?
L’Insee identifie plusieurs groupes particulièrement fragilisés :
- les familles monoparentales ;
- les étudiants confrontés au coût du logement et à la hausse des dépenses ;
- les travailleurs pauvres, dont le revenu reste insuffisant malgré l’activité ;
- les chômeurs : plus d’un chômeur sur trois est concerné par la pauvreté.
Ces profils traduisent des « nouvelles formes de pauvreté » que l’État estime devoir mieux cibler pour adapter les dispositifs existants aux besoins réels des publics concernés.
Mesures annoncées et critiques
Anne Rubinstein a rappelé plusieurs avancées récentes : le lancement de la solidarité à la source, des actions contre le non-recours aux prestations sociales et la définition d’un objectif de réduction de la pauvreté sur dix ans. Elle a toutefois admis la nécessité d’évaluer plus précisément l’adéquation des moyens mobilisés et leur efficacité sur le terrain.
Sur ce point, la Cour des comptes a récemment mis en cause la stratégie gouvernementale, la jugeant « illisible » et appelant à une meilleure évaluation de l’impact des mesures. Les associations de lutte contre l’exclusion, sur le terrain, estiment que les moyens restent insuffisants et alertent sur une dégradation de la situation pour de nombreux ménages.
Vers une adaptation des politiques sociales ?
Face à ces constats, l’exécutif se dit engagé à améliorer la coordination des dispositifs et à réduire le non-recours aux droits. Les observateurs insistent cependant sur la nécessité d’outils d’évaluation robustes et de mesures ciblées pour les publics les plus vulnérables : étudiants, familles monoparentales et travailleurs pauvres.
Chiffres, diagnostics et critiques se conjuguent aujourd’hui pour pousser le gouvernement à repenser certaines réponses sociales. Reste à transformer les intentions et les annonces en actions mesurables et efficaces, afin de faire reculer un taux de pauvreté qui atteint un seuil inédit en France.