Un expert a assuré vendredi devant la cour d’assises du Doubs que la première des victimes présentées par l’accusation au procès de l’ex-anesthésiste Frédéric Péchier a bien été empoisonnée. Le témoignage, rendu en visioconférence, porte sur le décès de Damien Iehlen en 2008 à la clinique Saint-Vincent de Besançon.
Les conclusions de l’expert
Dominique Chassard, professeur d’anesthésie à Lyon, a expliqué avoir analysé les résultats d’autopsie et envisagé dès 2011 «l’hypothèse d’un acte malveillant». Selon lui, l’examen médico-légal montre une intoxication à la lidocaïne à très forte concentration ayant provoqué le décès de l’homme de 53 ans, qui n’avait «aucun antécédent» médical susceptible d’expliquer la mort.
Écartant l’hypothèse d’une erreur technique ou d’une complication opératoire, l’expert a résumé sa conclusion : «Quelqu’un a mis de la lidocaïne en gros volumes dans la poche (d’anesthésie) avant qu’elle soit utilisée, et volontairement. C’est le seul scénario possible.
Comment l’empoisonnement aurait été commis
Le professeur Chassard a précisé que la poche de soluté, en caoutchouc, pouvait être perforée à l’aide d’une seringue sans laisser de trace visible : «C’est un petit trou indécelable à l’œil nu», a-t-il indiqué, ajoutant que la technique permettait d’introduire la substance toxique avant l’utilisation de la poche au bloc opératoire.
Réactions de la défense et éléments du dossier
Me Randall Schwerdorffer, avocat de la défense, a déclaré s’être montré «convaincu» par la démonstration de l’expert, tout en rappelant que l’accusation doit désormais démontrer que l’auteur des injections est bien Frédéric Péchier. L’ancien anesthésiste, qui nie les faits, comparaît libre et encourt la réclusion criminelle à perpétuité.
Le dossier retenu par la cour porte sur une trentaine d’empoisonnements présumés, dont 12 mortels, survenus entre 2008 et 2017. Damien Iehlen est présenté comme la première victime de cette série.
Cas voisins et limites d’expertise
Sur d’autres décès évoqués au procès, les conclusions sont plus nuancées. Deux experts entendus vendredi ont refusé de se prononcer sur le cas de Suzanne Ziegler, morte cinq jours après Damien Iehlen. Le médecin légiste Antoine Tracqui a souligné l’existence d’un terrain allergique et de problèmes cardiaques pouvant expliquer le décès et a rappelé qu’en l’absence d’autopsie il était impossible d’affirmer l’administration d’une substance toxique.
- Faits clés : décès de Damien Iehlen (2008), hypothèse retenue d’intoxication à la lidocaïne.
- Nombre d’affaires visées au procès : environ 30 empoisonnements, 12 morts.
- Lieu du procès : cour d’assises du Doubs, Besançon.
- Verdict attendu le 19 décembre.
Le procès, très médiatisé, confronte les expertises et les témoignages autour d’une série de décès qui ont profondément marqué le personnel soignant de la clinique. La cour doit maintenant apprécier la force des conclusions scientifiques et la chaîne de responsabilités avancée par l’accusation.