Le sentiment de toute-puissance et la recherche de reconnaissance sont au cœur des motivations des pyromanes, selon le psychiatre et criminologue Pierre Lamothe. Interrogé après plusieurs départs de feu dont certains imputés à un sapeur‑pompier volontaire dans l’Hérault, il distingue clairement la pyromanie de l’incendie volontaire lié à une vengeance ciblée.
Pyromane versus incendiaire : deux logiques distinctes
Pour Pierre Lamothe, l’incendiaire agit souvent avec un mobile connu (vengeance, gain, message dirigé), tandis que le pyromane poursuit une satisfaction psychique : anonymat, spectacle et sensation de « toute‑puissance ». Une simple allumette suffit, mais l’impact médiatique (images des Canadair, reportages) amplifie le caractère « hyperspectaculaire » de l’acte et alimente le besoin de reconnaissance.
Traits et comportements observés
- Recherche d’attention : le pyromane provoque un événement qui devient largement commenté.
- Besoins de reconnaissance : l’acte peut combler un sentiment d’infériorité ou de faiblesse.
- Ambivalence chez les pompiers : certains pyromanes liés aux services d’incendie cherchent à se sentir indispensables, puis à devenir le sauveur qu’ils ont eux‑mêmes mis en scène.
- Évitement de la responsabilité : beaucoup minimisent leur rôle (« ce n’est pas moi, c’est le vent ») et se rapprochent davantage de la honte que de la culpabilité.
- Récidive et impunité : la compulsion et la faible probabilité d’être identifié favorisent la répétition des actes.
Le cas cité par la presse — un sapeur‑pompier volontaire placé en garde à vue dans l’Hérault et ayant reconnu plusieurs départs de feu, évoquant l’adrénaline — illustre ce profil particulier : mêlant besoin d’être au cœur de l’événement et soulagement par l’action de secours.
La responsabilité involontaire et les conséquences
Selon Lamothe, les pyromanes n’ont généralement pas « la volonté de blesser » : lorsqu’une victime survient, ils répètent souvent « je n’ai pas voulu ça ». Pourtant, l’impression d’impuissance face à l’ampleur d’un sinistre peut pousser certains à se rendre, mais beaucoup échappent encore aux filets policiers malgré les progrès de la criminalistique — drones, analyse des foyers, techniques d’enquête.
La prise en charge thérapeutique reste difficile : la pyromanie, classée parmi les conduites compulsives, ne cède que rarement tant que l’auteur ne reconnaît pas sa problématique et accepte un suivi. C’est pourquoi, pour les spécialistes, la combinaison d’enquêtes renforcées et d’un accompagnement psychiatrique est indispensable pour réduire les risques de récidive.
Ce portrait psychologique, sans excuser les actes, aide à comprendre pourquoi certains départs de feu ne sont pas de simples délits mais l’expression d’un dysfonctionnement profond, qui demande à la fois une réponse judiciaire et une prise en charge en santé mentale.