Santé mentale : smartphone en hôpital, quel cadre pour les jeunes ?

La place des téléphones et des réseaux sociaux auprès des jeunes hospitalisés pour troubles psychiques suscite un vif débat depuis la publication du rapport de la commission d’enquête sur TikTok. Publié le 12 septembre 2025, le document s’interroge: «N’est-il pas contradictoire de vouloir soigner une souffrance psychique tout en laissant à disposition l’instrument qui la nourrit?» et préconise des mesures strictes pour protéger les mineurs.

Le rapport et ses constats

Après plusieurs mois d’auditions, la commission pointe le rôle de plateformes comme TikTok dans le déclenchement ou l’aggravation de troubles chez les jeunes: injonctions à restreindre l’alimentation, incitations au suicide, exposition à des pratiques d’automutilation. Le rapport évoque des «risques graves, documentés et persistants» et recommande notamment d’interdire l’accès des réseaux sociaux aux moins de 15 ans et d’instaurer un «couvre-feu numérique» pour les adolescents.

Cas concrets et témoignages

Parmi les auditions, le témoignage d’Arnaud Ducoin, père de Pénélope, attire l’attention: sa fille, qui s’est suicidée en 2024, consultait régulièrement des vidéos liées à la scarification, l’anorexie ou au suicide, y compris durant des périodes d’hospitalisation. Ce type de récits alimente la préoccupation des familles et des parlementaires.

Des pratiques hétérogènes selon les services

Sur le terrain, l’encadrement varie fortement. «Il y a autant de règles qu’il y a de services», résume la psychiatre Nathalie Godart. En hôpital de jour, il est fréquent que les adolescents déposent leur téléphone le matin, le récupèrent brièvement à la pause, puis le redéposent. À l’inverse, certains services ont choisi l’interdiction totale: la cheffe de service de l’hôpital Robert-Debré a expliqué à la commission qu’une suppression stricte des écrans avait été comprise et acceptée par les jeunes pris en charge.

Interdire ou encadrer ? Le débat des soignants

Les professionnels restent divisés. Le professeur Amine Benyamina considère que l’interdiction pure et simple serait «la pire des choses pour un adolescent» et plaide pour un usage limité et encadré afin de préserver la relation thérapeutique. De même, au CHU de Rouen, où sont traités des troubles du comportement alimentaire, on préfère des règles et des rappels à l’ordre plutôt qu’une interdiction stricte, pour éviter la dissimulation et préserver la confiance entre soignants et patients.

Recommandation nationale et enjeu de pédagogie

Adopté à l’unanimité, le rapport appelle à la création d’un cadre national clair régissant l’usage des écrans par les mineurs hospitalisés, afin de mettre fin à des situations paradoxales où des outils potentiellement nocifs restent sans supervision entre les mains de jeunes vulnérables. Les responsables de santé rappellent toutefois que la pédagogie et l’explication doivent accompagner toute mesure restrictive.

Le débat reste ouvert entre protection stricte et accompagnement éducatif. Les recommandations de la commission ouvrent la voie à une harmonisation des pratiques en France, mais leur mise en œuvre devra concilier sécurité, respect des soins et maintien du lien avec les familles.

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